Tout est semblant
sauf l'histoire qui fait l'artiste
Pour rendre la
mémoire plus inventive, j'ai pour principe de m'inspirer d'un
travail qui comporte quelques similitudes avec l'artiste d'hier;
comme je le dis souvent: "Tout est semblant sauf l'histoire qui
fait l'artiste". J'ai tant utilisé ce vieux dicton pour créer
mon propre univers par rapport à l'histoire de l'art, j'ai tant
voulu que cet univers artistique soit une vraie réaction à une
création universelle. C'est en découvrant les artistes d'une renaissance
émergente, pionniers des grandes réflexions et découvertes
sur l'art, que j'ai trouvé le chemin à l'inspiration. Il s'agit
d'artistes relativement présents dans ma mémoire, si on considère
ce qui existe de l'art aujourd'hui sur notre vieille planète.
Lorsqu'ils nous ont apparu sublimes, il semble que j'ai perçu
leurs grands génies bien avant le désir de savoir peindre. En
effet, j'ai d'abord découvert cette joie de les connaître en me
projetant bien des siècles en arrière. Un peu à la manière d'un
sourire qui vous habille et que l'on recherche, où un événement
heureux peut changer son cours sans effacer toutes traces de son
passé. Faut-il penser à une auto critique type au moment de créer
un tel univers artistique? Elle existe pour tout le monde ; je
dirai toujours que la beauté de l'art s'adresse à tous les groupes
de pensées. Au fait, je me fais plaisir, car le premier spectateur,
c'est moi. Évidemment, je sais bien que cet art " réaliste et
fantastique " ne s'adresse qu'à des initiés, à une certaine élite,
mais à partir du moment où un artiste devient son propre critique,
l'art plonge tout droit dans le passé d'une mémoire qui se fige.
Est-ce que vous vous imposez des restrictions mémorables parce
que vous peignez pour une certaine mode? Non ! Je crois plutôt
qu'il faut peindre dans le métaphorique, avec passion, et laisser
le spectateur s'imprégner de l'historicité de l'œuvre d'art picturale.
Comment peut-on croire à un tel engagement dans l'art si la mise
en scène de l'œuvre d'art est nulle, sans aucune idée magique,
tout au cœur du naturel, au détriment de l'artiste? Incroyable
tout ce que l'artiste peut avoir d'exigence, de crainte à échouer,
et d'émotion par rapport au concept de l'art, même s'il s'agit
pour lui-même de s'inventer une autre approche de l'art. Aujourd'hui,
il faut bien que je saute le pas, pour chaque mouvement artistique,
pour en vérifier la véracité, comme dans un vrai dédale, où l'on
perdure à jamais. J'ai dû peindre toute une vie, pour réaliser
qu'il y a encore des erreurs où un déroulement chronologique ne
s'applique toujours pas. Ainsi, depuis longtemps j'oeuvre, comme
un artiste en herbe qui remet le peu de son travail au lendemain,
jusqu'à ce que tout se mette en place. Cette expérience m'a bien
servie, pour lentement laisser mûrir en moi une connaissance accrue
de l'art, qu'on attend patiemment à chaque instant. Evidemment,
je ne vais pas souligner les mauvaises périodes de ma solitude,
mais je dois être en mesure de les contrôler sous tous ses angles
pour ne pas les renouveler. Toutes les oeuvres représentent à
chaque fois quelque chose de singulier, elles sont toutes importantes
à leur façon. Est-ce que l'art réaliste ou fantastique a une signification
particulière, représente-t-il un moment charnière dans tout ce
qui touche l'art et dans le parcours de l'artiste? Le trajet c'est
peut-être un peu plus pour les autres, mais sûrement un peu moins
pour soi-même. C'est aussi la première fois que je devine l'art
dans une autre dimension, prisonnier de ses mauvais génies qui
s'incrustent insidieusement dans les couleurs du moment. Sans
que je sache vraiment ce qui m'habite, à une heure donnée, les
idées surgissent en vrac, elles arrivent à point donné juste pour
faire un choix dans les moments difficiles. Les différences en
sont un bel exemple, et je peux les intégrer un peu partout dans
mon tableau, ce qui m'oblige à retravailler les repentirs pour
rééquilibrer à sa juste valeur l'ensemble de mon oeuvre d'art.
Je n'ai jamais eu autant le souci du détail, il représente beaucoup
pour mon équilibre. Cette démarche artistique, je l'ai depuis
si longtemps dans mon parcours! C'est un peu comme faire une pause,
on travaille un détail qui s'arrache de l'idée d'un tout planifié,
C'est la première idée qui me sert de tremplin. Maintenant, je
peins d'un seul jet par couches successives, un peu partout en
même temps, il faut tout voir en même temps. Cela n'est pas vu,
c'est juste un ressenti dans l'art. L'oeuvre première est souveraine,
en tant qu'artiste j'entre dans un autre monde où plus tard je
devrais en ressortir, Il y a parfois des espaces libres qui sautent
au hasard de la vue sans que je m'en rende compte, sans que je
me souvienne pourquoi j'avais travaillé, un peu comme un automate,
une oeuvre à plein temps. La précipitation ne doit pas devenir
prétexte au temps qui passe, mais au temps perdu par rapport à
une œuvre inédite de l'artiste.
André Martins
de Barros
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